En ce mois des fiertés, coup de projecteur sur une Amazone qui a traversé la maladie avec son épouse à ses côtés. Anne et Nani Haiti Perrault vivent en Polynésie. Une terre notablement friendly.
Lorsque le diagnostic de cancer du sein tombe brutalement en octobre 2014, Anne et Nani sont mariées depuis six mois. Elles se préparent pour leur voyage de noces, trois jours plus tard. « C’est le radiologue qui me l’a annoncé »raconte Anne, « alors que j’étais venue pour une simple mammographie de routine prescrite par mon gynéco ».
Elles maintiennent leur voyage et au retour, la biopsie confirme la mauvaise nouvelle. Anne est emportée dans le parcours de soin : mastectomie, chimiothérapie, hormonothérapie, radiothérapie… Les soins viennent à bout du cancer mais provoquent des effets secondaires sérieux. Anne souffre désormais de douleurs neurologiques permanentes très invalidantes.
Depuis cinq ans, le couple est donc emporté dans une véritable tourmente, « un tourbillon, une machine-à-laver qui emporte tout, y compris le couple »résume Anne. Elle et Nani s’étaient rencontrées six ans plus tôt, en Polynésie, alors que Anne était venue mener des formations en massages. Les deux femmes sont amoureuses. Anne, métropolitaine, décide de s’installer en Polynésie.
« Nani est restée près de moi, tout le temps, mais ça n’a pas été facile pour elle. »
Pour le couple, les soins représentent une épreuve. « Le plus dur pour moi psychologiquement a été de perdre un sein »raconte Anne, puis sont venues ces douleurs neurologiques provoquées par la radiothérapie.« Nani est restée près de moi, tout le temps, mais ça n’a pas été facile pour elle. Face aux douleurs, aux questionnements… l’accompagnant ne sait pas toujours quoi faire ». Sans compter qu’à la maladie, se sont ajoutés des problèmes financiers. Anne, travailleuse libérale, a dû arrêter son activité. Il a fallu surmonter tout ça, comme dans n’importe quel couple.
Les deux femmes habitent en Polynésie où l’homosexualité est bien tolérée culturellement. La seule mauvaise expérience d’Anne par rapport à sa vie sentimentale, s’est produite dans l’hexagone. « Lors d’un séjour là-bas, j’étais allée voir une thérapeute. Elle m’a conseillée de laisser s’exprimer ma féminité et elle a même suggéré que mon homosexualité pouvait être à l’origine de la maladie ». Anne est bien dans sa tête et dans son couple. « Je ne suis pas retournée la voir et c’est tout ».
Son épouse Nani témoigne d’avoir été souvent ignorée par les thérapeutes, mais le couple n’attribue pas cela à son homosexualité. « Nous en avons discuté avec des couples hétéros, ils ont connu la même expérience. Ici en Polynésie, les médecins ne prennent pas assez en compte le point de vue des accompagnant-e-s, mais pas assez non plus celui des patient-e-s. Il y a un gros travail à faire de ce côté-là ».
Le chantier est engagé. Faire entendre la voix des patient-e-s, c’est l’une des missions des Amazones du Pacifique dont Anne a pris la présidence en avril.
Article Laure Martin Hernandez I Photo © Elodie Martial