Tel le colibri de la légende (celui qui tient à faire sa part contre l’incendie de sa forêt même si sa contribution semble dérisoire), le Projet Amazones ne serait pas devenu ce qu’il est sans des dizaines d’amies et d’amis anonymes. À un moment où durablement, elles et ils se sont montré·e·s présent·e·s pour donner un coup de main, quelques heures de leurs temps, une compétence, une aide financière… Sur tous les territoires où les Amazones sont présentes, des colibris bienveillants sont autour d’elles. Leur contribution, souvent discrète, est inestimable.
Les Amazones ont été fondées en Martinique dans l’idée de rassembler des femmes affectées par des cancers. En 2017, nous constations alors que très peu de structures d’accueil de patientes et de soins de support existaient sur l’île. Nous avions besoin d’échanger entre nous, mais aussi d’agir puisque finalement, nous étions les mieux placées pour connaître nos besoins. Nous voulions des cours de yoga adaptés, nous voulions des conseils pour choisir nos perruques ou nos soutiens-gorge, nous voulions des lieux pour pouvoir entendre l’expérience des autres, nous voulions de la douceur dans un parcours de soins éprouvants… Plutôt que d’attendre que quelqu’un le fasse, peut-être, à notre place, nous allions organiser tout cela nous-mêmes. De cette volonté est né un groupe d’Amazones dont la force s’est révélée beaucoup plus importante que l’addition des forces de chacune.
Puis, un réseau s’est constitué. Des associations Amazones ont été créées en Guadeloupe, à Paris, dans le Pacifique. Elles sont en cours en Guyane et à la Réunion. Deux structures d’accueil, deux « Nids » ont ouvert en Martinique, un autre bientôt à Paris, et l’association est devenue incontournable dans les débats sur le cancer dans nos territoires. Nous-mêmes avons été surprises de ce que nous étions capables de faire.
Cependant, nous n’étions pas seules. Dans l’ombre des Amazones, des dizaines de bonnes volontés rendent nos projets possibles. En Martinique par exemple, comment imaginer les opérations Pumpidup, la rénovation de locaux d’accueil de patientes, sans Muriel Legal ? Mumu a répondu au premier appel à coup de main pour le Pumpidup à la Ligue contre le cancer. « J’ai perdu mes deux parents d’un cancer. J’étais touchée. J’ai donc appelé le numéro de l’annonce. J’ai eu Alexandra et comme je lui disais que j’étais très bricoleuse, elle m’a dit de venir. Tout de suite, j’ai aimé l’ambiance, ces valeurs d’amour et de bienveillance. C’est devenu des amies, et même une famille et c’est merveilleux de voir ce qu’on arrive à faire ensemble, quand chacun·e apporte ce qu’il·elle peut. »
Mika Govindootazoo lui aussi a été happé par l’ambiance des Amazones. La première fois, sur le même Pumpidup, il devait juste livrer des peintures avant de rentrer chez lui. « J’ai commencé par donner quelques conseils techniques, et dès que je disais je vais partir, je discutais avec quelqu’un d’autre. » Finalement Mika a pris le pinceau, il est resté plusieurs heures, il est revenu le lendemain, puis sur le chantier du premier Nid. « Il faut le vivre pour le comprendre » commente-t-il, « Il y a tellement une bonne humeur et une belle entente chez les Amazones. Ce sont des personnes presque plus joyeuses que celles en bonne santé ». Depuis Mika a gagné son surnom, il est notre « Micadeau ». Soutiens de la première heure également, des sponsors nous ont suivies : Hair Star coiffure, Alwego, Abadi.
À quelques minutes à vol de colibri de la Martinique, les Amazones Guadeloupe, construisent peu à peu leur Nid depuis avril 2019, grâce aussi à ces petites mains bénévoles au grand cœur comme Valérie Zaine, devenue l’infographiste de l’association sur tous les évènements. Devenir bénévole ? Une évidence pour Valérie : « J’ai assisté à la projection du film Amazones et cela m’a beaucoup touchée et j’ai donc eu envie d’apporter mon soutien à l’association. Je connais la souffrance, j’ai eu un accident de voiture très grave, et si je suis encore là, c’est grâce à ma famille, mes ami·e·s et surtout ces anonymes du personnel soignant, que je ne pourrais pas remercier. Je trouve juste normal de donner en retour, un peu de ce que j’ai reçu. » Dès lors, la communication digitale des Amazones 971, c’est son affaire : « Elle est toujours présente. Elle a été notre community manager durant l’évènement Blès, elle nous a fait des supports visuels pour les artistes, elle s’occupe parfois des photos et enrichit l’album de notre Facebook » précise Carina, présidente des Amazones Guadeloupe. « J’ai été très bien accueillie par les Amazones et je suis très contente de cette opportunité, car pour moi c’en est une, de pouvoir participer à ce beau Projet Amazones, et je reçois beaucoup plus, de chacune de ces femmes que je ne pourrais leur apporter » ajoute, l’infographiste encore très enthousiaste, d’être aux côtés des Amazones de Guadeloupe, depuis plus d’un an désormais.
Il y a aussi notre colibri des petits plats : Jacqueline : « Je n’ai pas hésité une seconde, à la demande de Carina, la présidente, pour être bénévole. Je veux contribuer à ce que l’association se développe afin d’accompagner encore plus de Guadeloupéennes. » Et que dire, de notre génération de colibris en herbe, nos petits bénévoles de 6 à 10 ans qui donnent déjà l’exemple à leurs ainés et le tout, avec énormément de plaisir et de bonne volonté comme Nolan 10 ans : « Je suis un “Amazon Guadeloupe” et je suis devenu bénévole de l’association car ma maman a dû se faire soigner pour son cancer du sein, ça a été une période très difficile pour nous deux : je l’aidais comme je pouvais car je ne voulais pas qu’elle meure. Je veux aider les autres femmes car je sais qu’elles sont très fragiles et qu’elles ne peuvent plus faire certaines choses, alors je suis là pour ça. Maintenant j’ai plein de taties qui peuvent compter sur moi. »
La fièvre Amazones a également traversé l’Atlantique, jusqu’à l’océan Pacifique pour retrouver, là aussi, nos colibris tahitiens. 32 intervenants animent les ateliers « soins de support », en partenariat avec le comité Miss Tahiti qui accompagne aussi les Amazones Pacific sur tous leurs évènements. : « J’ai souhaité prendre part aux actions de l’association car j’ai l’élan de contribuer et de mettre mes compétences au service du mieux-être féminin. En tant que coach de vie, j’accompagne des Amazones lors de séances individuelles selon leurs besoins.» Comme témoigne Heiata et nous l’explique Anne Perrault, présidente des Amazones Pacific : « Une fois par trimestre, nous proposons une matinée beauté en présence des Miss et surtout de Matahari Bousquet, miss Tahiti 2019, la marraine de l’association. Ces moments privilégiés et remplis de douceur et de bienveillance sont proposés aux Amazones, dès le petit-déjeuner, elles passent ensuite entre les mains expertes d’un coiffeur et de deux maquilleuses. Elles bénéficient également de précieux conseils pour l’entretien de leur peau et de leurs cheveux » poursuit Anne, la Présidente des Amazones Pacific. Tout un programme rendu également possible grâce aux colibris distributeurs de bien-être, à l’image de Jean-Marie, le coiffeur : « J’ai eu une prise de conscience suite aux évènements derniers, si je pouvais apporter du réconfort aux femmes atteintes du cancer avec la coiffure pourquoi pas et ce fût un plaisir partagé. »
Des colibris parisiens, ça existe aussi ! Parmi eux : Rony Lengrai, le président de l’association Ka Fraternité, qui compte 20 ans d’existence et un bon réseau en région parisienne. Rony a invité les Amazones dans le carnaval parisien de juillet 2019. Elles ont ainsi pu défiler sur les Champs Élysées avec des pancartes évoquant le cancer du sein. Une visibilité précieuse pour les Amazones. « Ma sœur est membre de l’association » explique Rony « dans la famille, nous avons eu des cancers. Au départ, je leur ai aussi donné quelques conseils pour créer l’association et elles savent que je suis là, si elles ont besoin de moi ! » Claudine Ambrosio Seymour, elle aussi, a été très utile, notamment en organisant des défis de décoration de tables pendant le confinement. À Paris, les battles hebdomadaires de photos de tables thématiques ont permis de garder le lien et, pour certaines, de relever des défis inédits.
« Toutes ces personnes nous donnent de la force, de l’énergie pour continuer » commente Claudine Fagour, la présidente des Amazones de Paris. « Et quand on voit comment elles s’impliquent, on se dit qu’on a raison. Ça nous encourage. Plus généralement, ça donne aussi de l’espoir. Dans ce monde individualiste, certains acceptent de donner sans attendre de contrepartie et ils ne sont pas si rares. Cela nous montre que les valeurs de la solidarité, de la générosité ont encore un sens » résume Claudine.
Moralité : essayons l’amour. On dirait que ça marche !
Article Anne Elisabeth Artzen – Laure Martin Hernandez. Illu ©Sophie Spéciale