Amazones est un féminisme

Une amie journaliste m’a dit que, écrire un article comme ça, dans notre magazine, c’est prendre des risques de ouf parce que les féministes « Ben, elles sont pas bien vues, tu vois ». 

Ouais, tu vois, une féministe c’est forcément une nana post- soixante-huitarde aigrie, prof, qui a une vie amoureuse avec un électro-encéphalogramme plat comme une crêpe et qui ne sait pas moduler sa voix, si ce n’est en mode haut- parleur intégré trop-j-ai-la-haine (Ce qui en même temps est aussi son droit le plus strict). 

Mais surtout, surtout, la critique number one au top 5 des critiques qui ont la cote des antiféministes c’est… (panpanpan) : « les féministes n’aiment pas les hommes !!… » Ben voyons. Bon, on va reprendre le truc depuis le début. C’est quoi le féminisme et pourquoi Amazones est un féminisme tout ça. 

Ceci étant, je confesse, que même moi au début de ma vie de jeune fille, je pigeais que dalle à ces concepts et à ces nanas systématiquement caricaturées dans les médias. Et puis j’ai grandi. J’ai été harcelée, stigmatisée, sous- payée, humiliée en public juste parce que je suis une femme. Que ma robe était trop courte, que je n’étais pas maquillée ou dernièrement que j’étais trop émotive et pas assez consensuelle quand je dénonce des irrégularités dans les parcours de soins chez nous. Et là, franchement les copains et les copines, on capte qu’il y a un sérieux problème dans notre société. 

Et ça remonte pas à hier comme l’explique Nadia Chonville, Doctoresse martiniquaise en sociologie: «Lorsqu’en 1789 les révolutionnaires établissent la Déclaration des droits de l’homme et du citoyen, ils ont bien écrit ce qu’ils ont écrit : les droits de l’homme et du citoyen, pas les droits humains. Les femmes n’étaient pas prévues au programme de l’égalité. Dès les premières heures de notre système républicain, les femmes (et a fortiori les femmes noires) ont été exclues de l’espace public. Considérées à vie comme des mineures, le pays des Lumières leur niait la capacité à penser par elles-mêmes, à prendre des décisions. Voilà pourquoi le féminisme s’appelle le féminisme : parce que la lutte pour l’égalité entre les femmes et les hommes consiste essentiellement à obtenir pour les femmes les droits qui leur ont été niés ou refusés. »

« Fais pas ta chochotte »

S’il y a bien un espace où le corps des femmes est mis à rude épreuve, c’est bien celui du monde médical. L’autrice féministe, Mona Chollet, dans son excellent « Sorcières. La puissance invaincue des femmes » y consacre d’ailleurs plusieurs chapitres. « Comme l’armée, la médecine est un corps de métier où semblent régner une hostilité foncière envers les femmes et un culte des attitudes viriles – on y a horreur des comportements de « chochotte ». Mais ce qui ne peut guère surprendre dans une institution vouée à l’exercice de la violence étonne davantage dans une discipline où il s’agit de soigner ». Oui, Mona n’y va pas de main morte, mais l’histoire lui donne raison. 

L’autrice y explique à grand renfort d’exemples, comment les femmes ont été chassées des facultés de Médecine avant d’y être réintégrées, d’abord en tant qu’infirmières puis en tant que médecins en 1868… 

Que dire des examens gynécologiques répétés dès le début de l’activité sexuelle à notre puberté. Voici un témoignage édifiant laissé sur notre page facebook « Lors d’un examen, la gynécologue m’explique que c’est ma faute si elle me fait mal en introduisant la sonde car j’ai un vagin « tout neuf. N’ayant pas eu d’enfants ou fait de fausses couches ».

Spéculum, frottis, palpé des seins, mammographie… Autant de mots qui nous font toutes frémir. Les hommes n’ont pas de palpé de testicules, de touché du rectum, ou de frottis du pénis dès qu’ils produisent des spermatozoïdes… Ben c’est bizarre ça Edouard ? 

Chuuuuuuut ! Tout va bien

Depuis que je me suis lancée à corps perdu pour faire entendre nos voix dans le parcours de soins en cancérie, les réactions dans le monde médical ont été diverses. 

Il y a les soignant.e.s vraiment heureux que nous prenions notre part dans le débat sur notre santé et avec qui nous collaborons, échangeons, tentons de créer un lien durable ce qui finalement est profitable à tous et toutes. Et il y a les autres, celles et ceux qui excellent dans l’art  de décrédibiliser ou minorer notre parole : « Nous exagérons » « nous parlons uniquement de ce qui ne va pas » « Nous incitons les patientes à prendre l’avion». 

Et puis, il y en a d’autres qui nous infantilisent, ne pouvant juste pas concevoir que des patientes (Oh my God) seraient à l’origine de notre asso et de ses actions. Il y a forcément un grand mentor mâle derrière tout ça (Ben oui, logique). Le truc qui m’a vraiment, mais vraiment vexée c’est quand, dans une grande réunion, un chef de service a sous- entendu qu’un de nos prestataires (un homme, et de préférence blanc) a pensé notre communication. Comme si cela le rassurait plutôt que d’imaginer qu’une femme, ancienne malade, noire et ses potes amazones aient pu conceptualiser tout ça toutes seules. 

En mettant ma cuirasse d’Amazone avec mes sistas pour rejoindre la meute, je n’imaginais pas une seconde le monde qui se craquèlerait ainsi tout autour de moi. J’ai pris de façon encore plus intense, bam, in my face, conscience de mon corps, des pressions que la société exerce sur lui et que je suis très souvent la première à exercer. Dès lors, Amazones, en plus d’être une asso accompagnant les femmes touchées par le cancer, prend valeur d’empowerment au féminin et c’est la raison pour laquelle nous avons rejoint le Collectif 8 Mars, collectif d’associations féministes, LGBT en mars dernier.  

J’ai réalisé, que tout est lié, et que pour avoir une société plus juste, plus bienveillante, plus humaniste en somme, nous devions en passer par le féminisme. We should all be Féminist ! 

Le féminisme n’est pas une action contre les hommes (comme on l’entend trop souvent), mais une action pour les femmes ! C’est une action pour remettre de l’égalité entre tous les êtres humains de notre belle planète bleue. 

Femmes, Hommes, Enfants, jènn kon matrité, allez viens, tu verras, c’est que du bonheur. On va danser tout nu autour d’un grand feu de la joie, avec des fleurs dans les cheveux, et de l’huile de roucou sur la peau… Mais naaaa je déconne.