S’il est considéré comme « féminin », le cancer du sein concerne également, une centaine d’hommes, ce qui représente environ 1% des 54 000 cas de cancers du sein recensés chaque année en France. En plus de la maladie, les hommes sont confrontés à la rareté des cas lors de leur prise en charge et aux idées reçues de l’exclusivité féminine vis à vis de ce cancer.
Des idées reçues et un diagnostic tardif
Généralement indolore et peu développé chez l’homme, le cancer du sein touche pourtant 1% de la gente masculine. Souvent diagnostiqué trop tard, car la majorité des hommes en négligent les symptômes, forte heureusement pas tous. Alain François, en fait partie. À 69 ans, ce travailleur social et cadre de la Protection de l’Enfance du Département de la Guadeloupe, né à Pointe-à-Pitre termine sa carrière professionnelle à Marie-Galante en avril 2017 et en Mars 2018, il est pré-diagnostiqué d’un cancer du sein droit par le Docteur Cattoni, son médecin traitant exerçant à Capesterre de Marie-Galante : « Après de rapides examens effectués sur place (échographie et mammographie à l’hôpital de Grand-Bourg), j’ai dû me rendre à Pointe-à-Pitre pour une biopsie qui confirmera un cancer du sein. Des contacts ont été établis avec l’Institut de Cancérologie de l’OUEST Paul PAPIN (ICO) situé à Angers pour une intervention rapide moins de 3 semaines après le diagnostic final. »
Pour poursuivre son parcours de soin, direction Angers donc : « Le choix de la ville d’Angers est lié à une réponse immédiate de prise en charge dès mon arrivée, mais aussi pour des raisons de logistique, mon séjour étant évalué à environ 6 mois, je pouvais disposer d’un logement et de moyens facilitant mes déplacements. En aucun cas, la compétence du corps médical de la Guadeloupe n’est remise en cause, mais la situation sanitaire de l’époque était anxiogène, en raison de difficultés liées à l’incendie du CHU de Pointe-à-Pitre. »
Une prédisposition génétique chez les hommes…
Comme environ 15% des cas de cancer du sein chez l’homme lié à une mutation héritée génétiquement, le cancer de Alain est héréditaire : « Je suis porteur du gène BRAC2, des membres proches de ma famille ont été atteints de cette pathologie, j’étais pourtant prévenu de la nécessité de tests génétiques que j’ai négligé. Opéré moins de 10 jours après mon arrivée à l’ICO Paul Papin de la ville d’Angers, j’ai subi une mastectomie totale de la glande mammaire du sein droit avec ablation du téton et mamelon, après un accueil de professionnels remarquables. A cet acte chirurgical, s’est ajouté une exploration des ganglions sentinelles afin de vérifier une éventuelle diffusion des cellules cancéreuses, ce ne fut pas le cas, j’ai donc évité la chimio. C’est une intervention gérée le temps d’une journée complète, puisque ma sortie a été programmée quelques heures après l’opération. »
Après une période de cicatrisation assez longue, Alain commence des séances de radiothérapie au quotidien durant 5 semaines : « J’ai pu regagner mon domicile à Marie-Galante, 5 mois après l’intervention, avec un traitement (hormonothérapie) prévu durant 5 ans. Des contrôles réguliers et un suivi pluridisciplinaire m’ont été proposés. J’ai décidé de déménager à Angers afin d’optimiser le suivi médical, répondant aussi à un besoin d’être rassuré face à une pathologie que je devais appréhender. »
Le cancer du sein chez l’homme représente donc 1% de l’ensemble des cancers du sein (femmes et hommes), mais reste malgré tout exceptionnel entrainant des détections tardives liées à l’incrédulité, et de ce fait à l’absence de gestes préventifs. Pourtant, ce cancer se soigne très bien s’il est traité précocement : J’ai pu observer une importante méconnaissance de cette pathologie aussi bien chez les femmes que les hommes. Par ailleurs, dans notre imaginaire d’homme viril et devant être conforté dans sa masculinité, nous qualifions cette partie de notre corps de « pectoraux » musclés et fermes dont nous sommes très fiers lorsque bien développés.»
Aujourd’hui, l’effet de sidération se dissipe lentement, Alain François a pratiqué le sport de façon intensive durant de longues années, le football et le tennis 3 à 4 fois/semaine ces dernières années : « Les effets secondaires de l’hormonothérapie sont très présents et ne me permettent plus des efforts longs et intenses (fatigue, douleurs musculaires, et articulaires, prise de poids, diminution des défenses). C’est aussi une remise en question de soi a à travers des formes nouvelles d’existence, la capacité à relativiser des angoisses subites. La parole devient essentielle, car elle permet de verbaliser nos incertitudes. L’animation et la prévention deviennent des moteurs dans mes fréquentations, j’informe beaucoup avec pour objectif majeur, la démystification de cette maladie qui touche aussi les hommes. Je déplore la réponse simplifiée, consistant à déclarer que le cancer du sein chez l’homme se traite comme chez la femme. Dans ma salle de bain, matin et soir, je suis spectateur d’une mutilation qui sans me complexer ne me laisse pas indifférent. Je ne suis plus capable de me baigner à la plage en public sans porter une chasuble anti UV. »
Si les progrès de la médecine et l’instauration de la campagne de communication : Octobre Rose, depuis 1994 en France, pour sensibiliser le grand public à la maladie, inciter au dépistage précoce et récolter des fonds destinés à la recherche, le diagnostic, la prévention mais aussi le traitement et la guérison. Le manque d’études en ce qui concerne les facteurs de risques chez l’homme, la plupart des cancers du sein ont un carcinome canalaire infiltrant et son diagnostic, traitement et suivi sont quasiment identiques chez les hommes et les femmes. « Vous l’aurez compris, bien au-delà des mots, des choix doivent être faits, se faire diagnostiquer génétiquement et oser affronter nos vieux démons d’homme. » Conclut Alain François.
Photo © Capès Dolé campagne Octobre 2020